Un
homme captura un jour un serin. L’oiseau, si petit qu’il tenait dans la
paume de sa main, tenta de négocier sa liberté en ces termes :
Qu’attends-tu donc de moi ? dit-il. Je suis si petit, si maigre, je n’ai
que la peau sur les os ! Rends-moi la liberté ! En échange, je te dirai
trois vérités très utiles.
- Soit, dit l’homme. Mais comment pourrai-je savoir si tes vérités sont utiles pour moi ?
- C’est très simple, répondit le serin. Je te dirai la première vérité
lorsque je serai encore dans ta main. Je te dirai la seconde lorsque je
serai sur la branche de cet arbre ; ainsi, tu auras encore le pouvoir de
me rattraper si cette vérité ne te convient pas. Enfin, je te dirai la
troisième, la plus importante, lorsque je serai là-haut dans le ciel.
- D’accord, dit l’homme. Dis-moi la première vérité.
- La voici : si tu perds quelque chose, s’agirait-il de ta propre vie, tu ne dois pas le regretter.
- Voilà une vérité profonde, pensa l’homme : le non-attachement aux
formes extérieures, en effet, est le secret de la vraie liberté. Et il
ouvrit la main.
L’oiseau s’envola sur la branche, d’où il proféra sa deuxième vérité :
- Si on te raconte une absurdité, n’y crois sous aucun prétexte avant d’en avoir eu la preuve !
- Très bien, dit l’homme, tu es beaucoup plus sage que ne le laissait
prévoir ton minuscule crâne d’oiseau : l’être humain, en effet, est
naturellement attiré par le mensonge et l’illusion, nés de sa convoitise
! Mais quelle est donc la troisième vérité ?
- C’est, lui
répondit le serin qui planait désormais dans les hauteurs du ciel, que
j’ai dans l’estomac, deux diamants gros chacun comme un de tes poings.
Si tu m’avais tué, ta fortune était faite !
Fou de rage,
l’homme tenta de jeter des pierres au serin. Puis, s’accusant,
maudissant sa stupidité, il se mit à pleurer sur son sort.
-
Imbécile ! s’exclama l’oiseau. Je t’ai dit de ne jamais regretter aucune
chose, et tu regrettes déjà de m’avoir libéré ! Je t’ai dit de ne
jamais croire une absurdité, et tu m’as cru lorsque j’ai prétendu, moi
qui tiens dans la paume de ta main, avoir avalé deux diamants gros comme
tes poings ! En raison de ta convoitise et de ton aveuglement, tu ne
pourras jamais voler dans le ciel comme moi !
1 commentaire:
Très belle illustration de la stupidité, de l'aveuglement, et de la cupidité humaines qui font que l'Homme, qui s'y laisse prendre, se ferme à lui-même, et par sa faute, l'accès au Ciel.
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